Et l’archet alors? Mariage parfait entre violon et archet


Bulletin des bénévoles – Janvier / January 2017 – Vol. 12 • No 1

Le Concours OSM Manuvie a une fois de plus mis en lumière le magnifique son des instruments à corde. Que ce soit le violon qui nous envoûte ou le violoncelle qui nous fait vibrer, ces instruments ont une place privilégiée dans la musique et bien sûr dans un orchestre.

 

De plus, l’excellente présentation des luthiers Wilder & Davis durant le Concours nous aura aidés à mieux comprendre la fabrication d’un violon et de ses composantes (bois, vernis) qui permettent de réaliser un instrument de qualité, voire exceptionnel  comme le fameux Stradivarius.

Mais qu’en est-il de l’archet dont on parle beaucoup moins? « Le violon, c’est l’archet », aurait dit Giovanni Battista Viotti, célèbre violoniste et compositeur (1755-1824). Une citation d’importance puisque c’est bien à l’utilisation d’un archet que l’on distingue les instruments de la famille du violon.

 

L’archetier est l’artisan qui fabrique les archets. Quant à l’archet, c’est d’abord une fine baguette de bois, garnie de crins de chevaux tendus d’une extrémité à l’autre. Elle est utilisée pour jouer avec les instruments de la famille des cordes frottées. L’extrémité haute se nomme la tête ou pointe de l’archet, et l’autre extrémité, par laquelle on tient l’archet s’appelle le talon.

Un archet mesure généralement 75 centimètres et son poids oscille entre 55 et 65 grammes.

Il est traditionnellement fabriqué en bois de Pernambouc. Un bois rouge sombre, à la fois dense et flexible, idéal pour cet usage et qu’on retrouve au Brésil. De nos jours, on utilise aussi d’autres matières, telles que la fibre de carbone, dont on apprécie la flexibilité, la longévité et la résistance aux variations de températures et à l’humidité.

 

Il existe plusieurs autres composantes mais je n’en retiendrai que les plus importantes.

 

D’abord, la mèche constituée de crins de chevaux. On utilise les crins d’étalons (non des juments) provenant de Mongolie, de Sibérie, de Mandchourie.

Il en existe de différentes couleurs, noir, brun, différentes variations de gris, des blonds ou blancs. Mais ce sont les crins blancs qui sont les plus utilisés car ils seraient « plus doux pour les archets ». Le crin de cheval est jugé irremplaçable pour le jeu musical même si certaines fibres modernes sont parfois utilisées pour l’apprentissage.

 

A l’intérieur de la tête de l’archet se trouve la mortaise à laquelle sont fixés les crins de la mèche. La tête est recouverte d’une protection : la plaque de tête. Cette plaque est souvent faite d’un matériau précieux : l’ivoire d’éléphant sur les archets de haute qualité.

 

L’archet ne peut être utilisé sans la colophane (produit de résine de pin) qu’on enduit sur les crins et qui permet aux cordes de vibrer en les frottant.

 

Sinon, les crins seraient trop lisses et ne produiraient aucun son.

De nos jours, voyager avec un archet n’est pas toujours simple. Les lois sur les articles comportant des matériaux dérivés des espèces menacées d’extinction sont très sévères. Les musiciens sont donc souvent confrontés à des douaniers récalcitrants concernant cette fameuse plaque de tête, soupçonnant la présence d’ivoire. Parlez-en aux musiciens de l’Orchestre du Festival de Budapest qui, lors d’un voyage aux Etats-Unis, se sont vus confisquer plusieurs de leurs archets et ont dû jouer avec des archets prêtés. Ils sont retournés à Budapest avec une amende.

 

C’est beaucoup de problèmes pour un bien petit composant. D’autres musiciens choisissent donc de changer la plaque de tête de leur archet pour des matériaux qui ne peuvent être confondus avec de l’ivoire. Fait à noter : on utilise aussi l’ivoire de mammouth qu’on retrouve dans le pergisol, le mammouth étant une espèce disparue, la réglementation ne s’applique pas.

 

Toujours pour contourner ce problème, des archetiers canadiens sont arrivés à concevoir un archet en n’utilisant aucun matériau susceptible de soulever l’inquiétude des douaniers, si cela est possible évidemment.

 

Vous l’aurez sans doute compris, il faut un « mariage parfait » entre violon et archet. Cette formidable union nous permet de « jouir » d’un son unique, que ce soit en solo, en concerto ou dans un orchestre. Ce n’est pas sans raison qu’on nous dit : « Arrête de nous jouer du violon »… expression qu’on n’a pas envie d’utiliser quand on assiste à un concert.

 

— Claude Rainville