Entrevue : Charles Richard-Hamelin retrouve Prokofiev


Charles Richard-Hamelin entretient une longue histoire d’amour avec Prokofiev. « Très tôt dans mon cheminement, dès l’âge de 13 ans, ce compositeur me fascinait, raconte le jeune pianiste québécois. Sa musique est tellement réfléchie, tellement intéressante. Il a été champion d’échecs, et ça paraît ! »

 

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Prokofiev a aussi été le déclic qui a fait basculer son intérêt pour le piano en passion, puis en profession.

Alors qu’il a 17 ans, son professeur lui demande d’étudier une sonate du compositeur russe. Après quelque temps, peu convaincu de sa performance, le prof lui dit que le morceau est sans doute trop difficile pour lui, et lui en assigne un autre. Piqué au vif, le jeune pianiste se décide à concentrer désormais tous ses efforts sur son instrument. Bien lui en prit : il se révélera plus tard comme l’un des pianistes les plus talentueux de sa génération.

 

Lorsque l’OSM lui a proposé d’interpréter cet automne le Concerto no 3, op. 26 de Prokofiev, il a été surpris. « Je n’ai pas joué ce morceau depuis plus de 10 ans, explique Charles Richard-Hamelin. Je le retrouve avec beaucoup de joie ! »

 

Il donnera trois représentations de ce concerto à partir du 11 octobre, dans le cadre du concert Charles Richard-Hamelin et la musique russe .

C’est pourtant à un autre compositeur, Chopin, que le nom de Charles Richard-Hamelin est naturellement associé. Sa maîtrise du répertoire de Chopin lui a valu en 2015 la médaille d’argent et le prix Krystian Zimerman lors du Concours international de piano Frédéric-Chopin à Varsovie.

 

Même s’il dit que ce prix a changé sa vie, ce n’est qu’une des nombreuses récompenses accordées au pianiste originaire de Joliette : Prix d’Europe, Révélation Radio-Canada en musique classique, premier prix au Concours national de piano de l’Orchestre symphonique de Toronto. Son premier disque a reçu l’an dernier le Félix « Album de l’année — Classique/Soliste et petit ensemble ». Cette année, il a été fait Compagnon des arts et des lettres du Québec (à 28 ans, il est le plus jeune après Xavier Dolan à avoir reçu une telle distinction).

 

Cette reconnaissance souligne une impressionnante carrière internationale. Rien qu’au cours des 12 derniers mois, il s’est produit en Allemagne, en France, en Italie, en Pologne, en Suisse, au Japon et à Singapour !

 

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Un pianiste talentueux et bien entouré

Toute cette expérience, il la met ces jours-ci au service du Concerto no 3, op. 26 de Prokofiev. « C’est une œuvre difficile à jouer, reconnaît Charles Richard-Hamelin. Prokofiev utilise chacune des 88 touches du piano, et je dois me rendre très vite d’un bout à l’autre du clavier ! »

 

Mais cette exigence technique est au service d’une musique qu’il qualifie de lumineuse, d’exubérante. « Ce que je trouve le plus remarquable chez Prokofiev est son sens de l’harmonie, dit Charles Richard-Hamelin. Il est tellement inventif pour aligner les sons ensemble et produire des sonorités originales, inclassables. »

 

Certaines sont un peu dissonantes. « Prokofiev s’amuse beaucoup à introduire des dissonances passagères dans un cadre qui reste d’un classicisme très charmant. Alors, il y a des effets qui accrochent l’oreille, mais ce sont des effets qui font du bien ! »

 

Le pianiste promet au public une œuvre excitante, « avec des effets sonores qui évoquent des images uniques, loin de ce qu’on entend habituellement, et avec de longues sections dans un rythme soutenu – un peu comme un train qu’on ne peut plus arrêter : ça tient l’auditoire en haleine. »

 

L’OSM connaît bien ce concerto pour l’avoir joué plusieurs fois et même l’avoir endisqué. L’orchestre sera dirigé cette fois par un jeune chef invité d’origine russe, Vasily Petrenko – qui, lui aussi, a déjà enregistré le concerto sur disque. Il est directeur artistique de l’Orchestre philharmonique royal de Liverpool et de l’Orchestre philharmonique d’Oslo.

 

Le concert Charles Richard-Hamelin et la musique russe offrira également Poème de l’extase, op. 54 de Scriabine, La mer, de Debussy, et Ma mère l’Oye de Ravel. Ce dernier morceau, inspiré de contes pour enfants, a d’abord été composé pour piano à quatre mains d’enfants, avant d’être adapté par Maurice Ravel en œuvre symphonique.

 

Le concert  Charles Richard-Hamelin et la musique russe sera présenté à la Maison symphonique de Montréal le mercredi 11 octobre à 20 h, le samedi 14 octobre à 20 h et le dimanche 15 octobre à 14 h 30.